Biographie de l'artiste Aurélia Chapelain



A LA RECHERCHE DU TEMPS PERDU

"Enfant non du grand jour et de la causerie mais de l'obscurité et du silence" comme le disait Proust de
son ouvrage "A la Recherche du temps perdu", le tableau-damier de Chapelain plonge le spectateur au
coeur même d'une confession énigmatique sur le temps.

Suivant une structure géométrique simple en damier, le regard tombe tour à tour sur des photomontages,
mettant en exergue un détail symbolique: boulet accroché à un pied, main virile caressant une enfant,
oeil, poitrine, loup... On pense aux photomontages de la dadaïste Hannah Höch, surtout dans la forme. Mais
chez Chapelain les images sont naïves, enfantines, issues d'un imaginaire collectif nostalgique; ce qui
renforce "l'inquiétante étrangeté" du tout. Le spectateur est face à un Jeu de l'Oie psychanalytique
dans lequel il est invité à déambuler. Récit intime et féminin qui nous rapproche des obsessions d'une Niki
de Saint Phalle, et ses Tableaux-Tir à la symbolique très personnelle ou encore de la contemporaine Annette
Messager, et son installation "Casino" mêlant fantasmes et enfance.

Des lettres, des bouts de phrases (jamais écrites de la main de l'artiste, qui joue au Maître-chanteur de
sa propre existence?) apparaissent sous forme de bulles ou de mots découpés dans des vieux journaux.
Elles font lien entre les cases, faussent ou explicitent un sens, guident le spectateur, non sans
humour parfois, vers des idées, des émotions et des souvenirs.
L'on rencontre également des objets bien réels, souvent des poupées miniatures et des montres à
aiguilles venues d'un autre temps. Temps perdu que Chapelain veut faire renaître, oublier, ou sublimer.
Car c'est sur les mécanismes interne de la mémoire que Chapelain insiste. Elle montre en effet combien la
mémoire est indomptable. Combien les souvenirs s'invitent puis disparaissent pour renaître à nouveau
dans nos têtes, dans un mouvement d'apparence aléatoire. Comment les images du passé sont soumises
aux puissances fulgurantes de l'inconscient. Et c'est baignés d'amertume et de mélancolie que ces
lambeaux de mémoire nous sont présentés ici. L'enfance est innocente mais à jamais perdue, le Prince Charmant
est mort mais glorifié, le sexe alléchant mais contrarié. La mort rode, et c'est à la manières des
Vanités de la Renaissance que crâne, squelette et araignée ponctuent ici ou là le tableau, et semblent
les seuls indices d'un futur jamais évoqué autrement par l'artiste.

C'est donc, paradoxalement, en s'appuyant sur sa propre vie et en sondant les méandres d'un inconscient
tyrannique et d'une mémoire capricieuse, que Chapelain touche à l'universel. Les oeuvres de l'artiste sont
comme des miroirs qui nous poussent à retrouver notre passé, nos sentiments les plus intimes, nos failles,
nos peurs. Chapelain nous force à nous retourner sur notre propre histoire.
Pour le coup, la madeleine a parfois un goût amer...

Jérôme TABET


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